Corruption : des agents publics camerounais indexés dans l’affaire Glencore
Au Cameroun, Adolphe Moudiki et Charles Metouck sont sous pression dans l’affaire Glencore. Le géant suisse, coté à la bourse de Londres et spécialisé dans les mines et le négoce de produits pétroliers, a admis devant la justice avoir versé près de cent millions de dollars de pots-de-vin à des officiels et à des agents publics en Afrique et en Amérique latine.
Des informations rendues publiques par les tribunaux indexent des employés de la puissante Société nationale des hydrocarbures (SNH), et la Société nationale de raffinage (Sonara). Ils auraient perçu près de 13 millions de dollars (12,1 millions d’euros, environ 7 milliards de francs CFA) de dessous-de-table entre 2007 et 2010, pour favoriser les opérations du groupe au Cameroun. Et les éléments de l’enquête évoquent un processus alambiqué de versements soigneusement dissimulés.
De quoi donner des grains à moudre à l’opposition, au sein de laquelle des voix s’élèvent pour exiger l’ouverture d’enquête locale pour faire la lumière sur l’éventuelle implication de deux des entreprises les plus emblématiques du pays. Leur objectif est d’obtenir que les personnes impliquées soient identifiées, punis et d’assainir le secteur.
C’est le cas de l’avocat et opposant Akere Muna, qui a saisi la Commission nationale anti-corruption (Conac), sans pour l’instant faire effet. Les voix qui réclament des lumières ne semblent pas non plus audibles à la chambre des comptes de la Cour suprême et à l’Agence nationale d’investigation financière (Anif).
Se sentant interpellé par l’opinion sur des faits reconnus de corruption, Adolphe Moudiki, le directeur général de la SNH depuis 1993, est monté au créneau pour affirmer que son entreprise n’était « ni de loin ni de près associée à de telles pratiques », d’ailleurs interdites. Dans un communiqué daté du 30 mai 2022, il dit avoir saisi les autorités américaines et anglaises pour obtenir « les éléments qui permettraient d’établir la véracité de ces allégations ».
Du côté de la Sonara, l’autre entreprise également citée dans le scandale, c’est plutôt Charles Metouck, son ancien directeur général entre 2002 et 2013, qui se défend des accusations. De sa prison, où il est incarcéré après avoir été « cueilli » par l’opération épervier, il affirme, à la faveur aussi d’un communiqué, n’avoir « jamais signé un quelconque contrat avec la société Glencore ».
Confusion totale. Si ceux qui sont censés avoir traité avec le suisse le nient, avec qui Glencore a-t-il collaboré au Cameroun ? Ailleurs, des têtes seraient déjà tombées. Mais comme nous sommes au Cameroun de Paul Biya, attendons de voir comment les gens vont justifier la distraction de la richesse du pays…