
Tchad : Libération inattendue de deux leaders rebelles centrafricains après une détention de 11 mois à N’Djamena
Dans un revirement de situation surprenant, Abakar Sabone et Mahamat Al-Khatim, deux figures majeures de la rébellion centrafricaine, ont été libérés par les services de renseignement tchadiens dans la nuit du lundi 3 au mardi 4 mars 2025. Après avoir passé onze mois en détention à N’Djamena, les deux hommes ont été conduits à leur domicile par des agents de l’Agence Nationale de Sécurité (ANSE), mettant fin à une période de captivité qui avait suscité de vives inquiétudes quant à leur sort.
Leur arrestation, qui remonte à avril 2024, avait été perçue comme un acte arbitraire, intervenant peu de temps après qu’ils aient publiquement dénoncé des actes de détournement de fonds impliquant de hauts responsables de la sécurité tchadienne. Ces fonds, alloués dans le cadre de la médiation angolaise visant à résoudre la crise en République centrafricaine, étaient destinés à soutenir les efforts de paix et à faciliter le dialogue avec les groupes rebelles.

La libération de Sabone et Al-Khatim s’est déroulée dans des circonstances pour le moins singulières. Aux alentours de 1 heure du matin, ils ont été informés par leurs gardiens de leur libération imminente. Sans autre forme d’explication, ils ont été conduits à leur domicile par des agents de l’ANSE. Durant leur détention, ils ont été successivement détenus dans une cellule exiguë, puis transférés dans une villa de N’Djamena, où leurs conditions de détention étaient légèrement moins rigoureuses.
Le caractère soudain de cette libération a laissé leurs proches et observateurs perplexes. Aucune raison officielle n’a été communiquée par les autorités tchadiennes, alimentant les spéculations quant aux motivations réelles de cette décision. Cette opacité rappelle les conditions de leur arrestation, qui avait également été effectuée sans respect des procédures légales, suscitant des critiques de la part des organisations de défense des droits humains.
Quelques semaines avant leur arrestation, Sabone et Al-Khatim avaient accordé une interview à RFI, dans laquelle ils révélaient l’interruption des versements de fonds angolais destinés à sept leaders de la Coalition des patriotes pour le changement (CPC). Ils accusaient nommément Ahmed Kogri, ancien chef de l’ANSE et actuel conseiller à la présidence tchadienne, d’être impliqué dans le détournement de ces fonds, estimés à plusieurs milliards de francs CFA. Ces accusations avaient mis en lumière les tensions et les rivalités au sein des cercles du pouvoir tchadien, ainsi que les enjeux financiers liés à la médiation en Centrafrique.
